Il convient de commencer par revenir sur l'étymologie du terme. Le mot enfer est directement issu du latin inferi qui désigne les royaumes « inférieurs » : sous la terre, dans une conception verticale du monde. Pour simplifier, le ciel est le séjour des dieux, la terre celui des hommes et les enfers sont la demeure des morts.

 

I. L'Enfer biblique

Dans la Bible1, la description varie selon l'Ancien et le Nouveau Testament2. Il y est au départ question du Shéol. Ce terme hébreu qu'on a souvent du mal à traduire désigne le « séjour des morts ». La Bible étant le texte le plus traduit au monde, on comprend qu'il puisse y avoir de nombreuses versions et de nombreuses discussions. Les versets parlent donc successivement de « fosse » (Psaumes, chapitre 16, verset 10) de « pays des profondeurs » (Ezechiel, chapitre 31 verset 14) ; de « monde d'en bas » (Proverbes, chapitre 1 verset 12). L'idée d'un espace inférieur revient régulièrement.

 

L'Apocalypse, dernier livre de la Bible, emploie même le terme l'Hadès, pour désigner le séjour des morts3. On y raconte que les méchants seront précipités dans un « étang de feu » (chapitre 20 versets 14-15). La mise en musique de Wolfgang Amadeus MOZART (1756-1791) dans son requiem intitulé Dies Irae (c'est-à-dire "Jour de colère", 1791) reste une des interprétations musicales les plus connues et appréciées de ce terrible moment avec le requiem (1874) de Guiseppe VERDI (1813-1901). Les sculptures du tympan de l'église Sainte-Foy de Conques donnent également un aperçu de jugement dernier, de l'enfer et des sept péchés capitaux (voir aussi C'EST L'APOCALYPSE ! 1/3 : Jour de colère)

 

 

A la Renaissance, le peintre flamand Jérôme BOSCH (Hieronymus Van AKEN, vers 1450-1516) a réalisé un impressionnant triptyque4 devenu très célèbre  :

l'Enfer selon BOSCH
l'Enfer selon BOSCH

Le jardin des délices terrestres (1500-1505).

 

Le panneau de droite représente l'Enfer de façon étonnante. A l'arrière-plan des volcans noirs entrent en éruption et des villes obscures sont en flammes. Au premier plan, des créatures difformes, parfois drôles pour le public du XXIe siècle, des démons, des monstres torturent des humains qui ont accompli des péchés durant leur vie. Vous serez surpris de voir la maîtrise des couleurs, le choix des formes qu'on retrouve parfois dans la peinture surréaliste.

 

 

Comme tout royaume, le monde souterrain est dirigé par un "roi". Les interprétations des textes bibliques concernant l'Enfer feront de Satan, le Diable (dont le nom signifie "le diviseur") le maître des lieux. Il reçoit les pécheurs, les âmes damnées, et règne sous la terre, au milieu d'un monde de flammes.

Certains voient dans la représentation du Balrog, un démon souterrain dans Le Seigneur des Anneaux de J. TOLKIEN, une sorte d'avatar du Diable. Ce que peuvent confirmer les nombreuses illustrations de John HOWE.

Le Pont de Khazad Dum, 1995 © John Howe ; www.john-howe.com ; reproduit avec l'aimable autorisation de l'auteur

Le Pont de Khazad Dum, 1995 © John Howe ; www.john-howe.com ;

reproduit avec l'aimable autorisation de l'auteur.

 

Pour terminer, nous verrons l'exemple de Don Juan, personnage de séducteur et de libre penseur créé par l'Espagnol Tirso de MOLINA (1583-1648). Dans l'adaptation de MOLIERE (1622-1673), Dom Juan ou le festin de pierre (1665) on voit la statue du Commandeur venu d'outre-tombe pour emporter le héros en enfer, en punition de ses péchés. MOZART en a fait un opéra Don Giovanni (1787), qui reprend ce moment. Moment auquel les mises en scène les plus audacieuses donnent un aspect véritablement infernal.

 

 


Le poète Charles BAUDELAIRE (1821-1867) dans son recueil poétique Les Fleurs du Mal (1861) donne sa vision avec "Don Juan aux enfers" ; il écrit que "Quand Don Juan descendit vers l'onde souterraine" il "Regardait le sillage  et ne daignait rien voir". Tous ces auteurs s'accordent à montrer que c'est un voyage dont on ne revient pas.

 

 

 

Conformément à la vision chrétienne, l'Enfer est un lieu du châtiment, un endroit effrayant qui montre ce que l'on risque si on agit mal durant sa vie.


La suite dans une semaine avec "Descentes aux enfers II : Les enfers mythologiques"

Je remercie chaleureusement John HOWE d'avoir permis de diffuser ici ses illustrations.

Et le mois prochain vous lirez : Cœur d'homme, peau de bête", quand l'humain devient animal...

 

 

1 Traduction œcuménique.

2 Cette appellation est celle des chrétiens ; l'Ancien Testament renvoie à la 1ère partie, avant la venue de Jésus Christ, le Nouveau Testament renvoie à la 2e partie, après la venue de Jésus Christ.

3Le Nouveau Testament a été rédigé par des gens qui connaissaient la langue et la culture grecques.

4 Œuvre en 3 parties

 


N. THIMON